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Nous sommes tous victimes de la hausse vertigineuse des prix des aliments depuis un bon bout de temps. De fait, nous faisons face à une inflation alimentaire sans précédent et à une augmentation historique des profits des grandes corporations alimentaires jamais vu depuis 41 ans. Ce marché privé, bien que s’occupant d’un besoin essentiel s’il en est un, répond d’abord aux intérêts de ses actionnaires. Leurs dirigeants ont le mandat de faire fructifier leurs dividendes et c’est d’ailleurs ce pour quoi ils sont récompensés avec des bonus de 5 millions cette année pour un d’entre eux.

Les faibles revenus en arrachent

Cette situation entraine cependant un prix social très élevé : nombre d’entre nous en souffrent plus que d’autres. On parle ici évidemment des plus pauvres d’entre nous (20% de la population) qui vivent un drame quotidien les obligeant à réduire drastiquement leur consommation de fruits, de légumes et de viande, avec un impact non négligeable sur leur santé, mais aussi sur l’économie en général. On parle aussi de plus en plus de familles avec salaires de la classe moyenne inférieure qui doivent changer leurs habitudes alimentaires en coupant dans la restauration, les fromages, les gâteries, etc, pour se concentrer sur l’essentiel et arriver à joindre les deux bouts.

Cette inflation des prix des aliments chez nous n’est pas près de ralentir, aux dires des experts avec une augmentation majeure des prix pour les 2 prochaines années si nous laissons le marché continuer à déterminer seul la marche à suivre en alimentation.

Le rôle de l’État

Ça ne peut plus durer comme ça. On ne peut plus regarder les choses se détériorer ainsi sans cibler la principale instance ayant les moyens et la légitimité de faire changer les choses, l’État, seul gardien du bien commun. Comme il le fait déjà en matière de besoins essentiels comme l’eau, la santé, l’éducation, etc., il doit s’attaquer à cette logique inflationniste en ciblant le nerf de la guerre : les profits excessifs des grandes corporations alimentaires soient les grandes chaines alimentaires, mais aussi les grands transformateurs et les grossistes.

Les responsables doivent demeurer… Responsables.

Nous inspirant des grands pays européens qui ont imposé à hauteur de 35% les surprofits des compagnies pétrolières, nous ne demandons pas à l’État de réguler la tarification des prix alimentaires, mais d’imposer à la même hauteur de 35% les surprofits des grandes corporations alimentaires. Le calcul en est simple : nous fiant sur les déclarations officielles de leurs profits des 5 dernières années normales (avant la pandémie), les surprofits à imposer correspondent à tous les profits de l’année en cours accumulés sur notre territoire dépassant la moyenne de ces 5 dernières années. Remarquons qu’il leur reste tout de même 65% de ces surprofits. Nous aurions pu être plus incisifs d’autant plus que nous demandons aussi à l’État de redistribuer ces sommes à la population selon une échelle progressive de leur revenu.

Une pétition exprimant le désir de justice de la population

Pour signifier ce désir de justice nous lançons une pétition nationale réclamant au gouvernement une telle imposition de 35 % et une telle redistribution de ces profits excessifs. Ce n’est en effet que justice que ceux qui s’en sont mis plein les poches en redonnent une bonne part à ceux qui ont vidé les leurs pour simplement se nourrir.

Nous nous attendons à ce que cette démarche ralentisse un tant soit peu cette inflation alimentaire. Du moins, elle nous permettra de lancer un débat public sur cette incongruité que l’accès économique à un besoin aussi essentiel que la bouffe repose uniquement sur des intérêts privés sans que la société et ses représentants n’aient un mot à dire.

Il est grand temps que le bien commun prévale sur les intérêts de quelques-uns.

Jean-Paul Faniel
Directeur général
Table de concertation sur la faim et le développement social du Montréal Métropolitain
Juin 2023