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Article de Guylaine Hébert, Directrice de la Table ronde de St Léonard

Table Ronde St Léonard

« Ça n’a plus de bon sens ! L’épicerie me coûte les yeux de la tête. C’est pas mêlant, depuis deux ans, j’ai calculé, ça me coûte 100.00$ de plus par mois. »

On est au dîner communautaire de la Table ronde de St Léonard, un organisme communautaire de première ligne qui vient, entre autres, en aide aux populations en difficulté financière. Trois dames âgées attablées devant un bon repas de boulettes sauce au tomate échangent entre elles de leur difficulté à joindre les deux bouts. Celle qui vient de parler a 91 ans. Elle vit encore chez elle, mais elle vient régulièrement au resto communautaire qui ouvre ses portes les mercredis et vendredis midi, parce qu’elle a de la misère avec son 933.00$ par mois à concilier loyer, transport, médicaments et bouffe. Son amie lui répond qu’elle n’achète plus de viande, « C’est trop cher. C’est des prix de fou ! »

Je les comprends. Les repas de bonne qualité que nous offrons à prix modique aux gens nous coûte plus cher que l’an passé, même si depuis quelques mois, nous recevons 2 fois par mois des denrées de Moisson Montréal. On n’ose pas refiler cette hausse ou si peu, aux personnes qui nous fréquentent car notre mission n’est pas de les accabler plus qu’ils ne le sont déjà.

Ce qui me choque dans cette situation, c’est que, pendant ce temps-là, les grandes chaines d’alimentation s’en mettent plein les poches. J’ai lu dans le Journal de Montréal que Loblaw, par exemple, a fait des profits de 40% de plus que l’an passé. Dans le même article, on ajoutait que « cette maison mère de Provigo a vu ses ventes d’aliments augmenter de 2,4% pour atteindre 8,7 milliards de dollars au dernier trimestre. » Pendant qu’on en arrache pour se nourrir, les actionnaires de cette méga compagnie engrangent des profits gargantuesques sur le dos des gens.

Il faut que le gouvernement mette un frein à cette boulimie galopante. Notre regroupement régional communautaire, la Table sur la faim et le développement social du grand Montréal, demande que le gouvernement Legault stoppe cette inflation injustifiée en établissant des règles pour limiter ces surprofits, comme il le fait pour les tarifs d’électricité plafonnés à 3% de plus.

Piquée au vif par ces témoignages accablants, je me suis adressée aux autres 50 convives de ce repas communautaire. Tous m’ont répondu sensiblement la même chose. Les gens ne vont plus au restaurant et ne se font plus livrer chez eux. Ils font attention au gaspillage et courent les spéciaux. Une nouvelle retraitée nous dit qu’alors que son revenu diminue de 30%, les prix, eux, augmentent. Elle ne sait plus comment s’en sortir. Et d’ajouter : « Ce qui s’effrite, c’est non seulement la qualité de vie des gens, c’est leur confiance dans le gouvernement qui devrait diriger pour le bien-être de tous, mais qui laisse les plus riches s’enrichir davantage alors que la classe moyenne s’appauvrit. Les gens vont réagir tôt ou tard. Il y a une limite à faire le dos rond quand on a le ventre creux.

Guylaine Hébert
Directrice de La Table ronde de St Léonard

 

Retrouvez également la lettre ouverte publiée dans le Journal Métro : “Le prix des aliments de base, une responsabilité de l’Etat”