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dessin - action communautaire
Table ronde communautaire

 

Conférence de Jean-Paul Faniel pour les Journées 2006 de la TROC-Montérégie : L’action communautaire : pour ou avec les citoyens ?

Mesdames et Messieurs,

Bonjour,

On m’a demandé de vous entretenir de l’action communautaire autonome. J’aurais pu vous référer aux documents du comité aviseur du SACA, mais c’est plutôt une courte histoire qui m’est venue à l’esprit. Laissez-moi vous la raconter.

Elle se situe au Moyen-âge. Au détour d’un chemin, un voyageur débouche sur un grand chantier de construction. Abordant trois ouvriers à l’ouvrage, il leur demande alors ce qu’ils font.

Le premier avec un air agacé lui répond : « Vous le voyez bien, je taille de la pierre! ». Le second, plus avenant, lui dit : « Mon bon monsieur, je gagne ma vie et celle de ma famille! ». Le troisième, l’œil allumé, lui répond en montrant le mur de pierre derrière lui : « Moi, monsieur, je construis une cathédrale ! »

Vous l’avez compris, les trois avaient raison, mais un seul avait de la vision.

Avoir de la vision, c’est se référer au but poursuivi

C’est un peu là le sens de mon propos aujourd’hui. Pour bien cerner l’action communautaire autonome, il faut avoir de la vision, c’est-à-dire revenir au but poursuivi.

Quand j’ai commencé à militer dans le mouvement communautaire, dans les années 60, le but poursuivi était de reprendre collectivement du pouvoir sur notre vie collective. On n’appelait pas ça du travail communautaire, mais de l’action populaire. Et par populaire, on n’entendait pas une certaine cotte de popularité publique. On se référait plutôt à l’origine du mot, soit au peuple et à ses aspirations.

Vous remarquerez également que je ne parle pas des besoins, mais plutôt des aspirations, des rêves des gens. Il s’agit là d’une différence énorme. Le mouvement populaire travaillait alors à soutenir l’organisation citoyenne autour de ses rêves collectifs et ce, en y croyant assez fort pour se mettre ensemble à travailler à les construire.

On a ainsi développé une myriade d’organisations citoyennes que les gens à la base contrôlaient : épiceries communautaires, supermarchés coopératifs (COOPRIX), cliniques populaires de santé, garderies populaires, cliniques juridiques, associations de locataires, coopératives de logement, organisations de défenses des droits sociaux, etc.

Par la mise sur pied de ces organismes, on soutenait les citoyens dans la reprise de pouvoir collectif sur l’un ou l’autre aspect de leur vie. Par là même, on travaillait à l’organisation collective de notre mieux être ensemble et on assumait déjà une partie du rôle que l’État québécois commençait de plus en plus à se donner.

En effet, à cette époque de la « Révolution tranquille », l’État reprenait depuis peu ce rôle d’organisateur de la vie collective auparavant dévolu, pour plusieurs grands pans de notre vie sociale, aux communautés religieuses et aux paroisses : la santé, l’éducation, le registre civil, etc. Il commençait de plus à doter le Québec d’un réseau d’autoroute pour accélérer le transport commercial. Il nationalisait l’électricité, mettait sur pied les grands instruments collectifs de développement économique comme la Caisse de dépôt et de placement, la Société générale de financement, etc. « pour inscrire la société québécoise dans l’ère moderne », comme on disait alors.

Pas étonnant alors que l’État se soit considéré concerné par les initiatives du mouvement populaire, qu’Il se mette alors à récupérer certaines d’entre elles dans son réseau public de services et qu’Il commence à en financer plusieurs autres.

Ainsi, leurs pratiques étant apparues assez concluantes, les cliniques populaires de santé sont rapidement devenues les CLSC, les garderies populaires sont devenues plus tard les CPE et les cliniques juridiques ont fait naître le Service juridique, tandis que, par ailleurs, le gouvernement mettait sur pied le programme d’initiatives locales (PIL) en dégageant des fonds publics pour soutenir les interventions du mouvement populaire naissant.

Le financement étatique, une aide orientée

Cependant, cet argent ne venait pas tout seul, mais avec un but, une perspective, la même qui inspirait toute la dynamique de l’État, soit organiser les services essentiels à la population, afin de mieux faire fonctionner le système économique dominant.

Très politisé, le mouvement populaire de l’époque voyait bien que les subventions de l’État cherchaient à détourner les organismes de leur but premier pour les faire servir ceux de l’État. Mais, nous nous disions que cela nous permettait d’accélérer le travail d’organisation citoyenne en payant une permanence et que nous n’avions qu’à être vigilants pour maintenir le cap sur les aspirations des citoyens. Et c’est cette vigilance qui caractérisa longtemps le mouvement populaire.

Cependant, peu à peu, de subventions en subventions, avec le roulement de personnel effarent qui caractérise également le mouvement dû effectivement aux conditions de travail et de vie, avec le développement de nouveaux programmes de plus en plus ciblés vers le transfert du rôle de l’État vers les organismes communautaires, une dérive s’est produite. Pour s’assurer d’un financement récurrent, on s’est de plus en plus collé sur les exigences gouvernementales accompagnant les programmes, en s’éloignant d’autant des aspirations des citoyens qui constituaient pourtant notre raison d’être initiale.

Et, peu à peu, une partie du mouvement populaire a de plus en plus répondu aux besoins essentiels de la population (rôle pourtant reconnu à l’État) en lui offrant des services correspondants, mais avec des salaires de misère et des conditions de travail déplorables que l’on acceptait ainsi, portés que nous étions par la mission sociale qui nous guidait.

Exit le soutien à l’organisation citoyenne, on donnait des services à des clients, comme l’État. On ne travaillait plus avec les gens, pour reprendre du pouvoir sur leur vie. On travaillait pour les gens, à les soulager de leurs maux.

Du populaire au communautaire

C’est dans cette foulée que le changement de nom s’est opéré. Les organisations populaires sont devenues, dans le jargon de l’État, des organismes communautaires. La référence n’était plus le peuple, mais la communauté de proximité. C’était moins ample, moins global, plus local, moins politique. On ne parlait plus du peuple. C’est tout juste si on ne revenait pas à la paroisse. Ainsi, de plus en plus d’interventions sont devenues « communautaires ».

Même les services de l’État se sont affublés du terme. On parle depuis un bon bout de temps des « organisateurs communautaires » de CLSC. On parle également de plus en plus de « l’école communautaire ». On a même eu droit à la « police communautaire ». C’est tout dire de l’édulcoration des mots qui servent à nous définir.

Pour qu’une chatte y retrouve tout de même ses petits, on a alors raffiné le concept : on parle maintenant de l’action communautaire autonome et on décline ses attributs pour la démarquer des autres types d’interventions confondantes.

Le soutien au développement des personnes et de leur milieu

Je vous suggère pour s’y retrouver de tout simplement se référer de nouveau au but poursuivi : soutenir l’organisation citoyenne afin que les gens reprennent du pouvoir sur leur vie. Et, pour ce, de se référer au concept de développement social lui aussi bien à la mode, mais compris ici comme le soutien au développement des personnes et de leur milieu.

Comprenons-nous bien ! Il ne s’agit pas ici de délégitimer les services à la population, mais bien de les comprendre en fonction des buts qu’ils poursuivent.

Par exemple, face au problème de l’insécurité alimentaire, c’est une chose de nourrir les gens par du dépannage alimentaire afin qu’ils survivent dans leur pauvreté. Si on a du cœur, on ne peut pas les laisser démunis. Par contre, c’en est une autre de soutenir des groupes d’achats coopératifs, des jardins collectifs et des cuisines collectives afin que les citoyens appauvris et les autres intéressés reprennent du contrôle sur leur alimentation.

Autre exemple, l’intervention alimentaire dans les écoles. En 1991, lorsqu’on a fait une conférence presse pour signaler le fait que des écoliers arrivaient en classe le ventre vide et avaient ainsi de la difficulté à se concentrer sur leur apprentissage académique, le gouvernement a répondu en mettant sur pied les Mesures alimentaires en milieu scolaire qui fournit le dîner à certains enfants appauvris, tandis qu’un organisme communautaire mettait sur pied la formule des petits déjeuners à l’école. Pourtant, nous avions demandé que l’État soutienne les parents afin de les aider à assumer leur responsabilité, pas qu’il remplace les parents.

Quelques organismes communautaires ont identifié le problème et ont mis sur pied, parallèlement aux Mesures Pagé, des interventions en milieu scolaire pour favoriser l’apprentissage nutritionnel et culinaire des écoliers et soutenir leurs parents dans des réseaux d’entraide pour les aider à assumer leurs responsabilités parentales.

La même distinction existe dans le logement entre les Habitations à loyer modique (HLM) et les coopératives d’habitation, dans la santé entre les CSSS et des cliniques communautaires comme commencent à s’en redonner certains villages éloignés et mal desservis. Dans un cas, on donne un service pour répondre à un besoin essentiel, ce qui est tout à fait légitime et même nécessaire. Dans l’autre, on soutient l’effort citoyen pour se doter d’un outil de reprise de pouvoir sur une partie de sa vie.

Une autre branche du mouvement populaire s’est spécialisée dans la revendication sociale et là aussi c’est légitime et même nécessaire. On revendique que l’État assume vraiment son rôle et augmente ses subsides aux citoyens qui en ont besoin et à leurs services sociaux. Bravo! J’en suis et plutôt deux fois qu’une ! Mais si cette dynamique de pression fait l’économie de l’organisation citoyenne, c’est là où on fait les choses pour les citoyens et non avec eux. J’en conviens, c’est plus long de mobiliser les citoyens plutôt que les seuls militants convaincus de nos organismes. Mais c’est là le passage obligé si on veut vraiment que la société change en profondeur.

La clé : l’expérimentation par le citoyen du pouvoir citoyen

En fait, l’intérêt du mouvement communautaire dans son essence, c’est de soutenir les citoyens dans l’expérimentation du pouvoir sur leur vie à travers l’expérience de l’organisation collective, pas de faire les choses à leur place, ni de toujours parler en leur nom.

Dernièrement, on a vu apparaître une autre branche dans le mouvement communautaire, celle de l’économie sociale qui, soit dit en passant n’a fait que reprendre la formule coopérative en la dotant d’un coup de pouce initial de l’État. Rapidement, on a cherché à tracer une ligne de démarcation entre elle et l’action communautaire alors que, là aussi, à mon avis, la ligne de démarcation se situe plutôt entre ceux qui n’offrent que des services et ceux qui permettent aux citoyens de s’organiser pour reprendre du pouvoir sur un autre aspect de leur vie : leur travail.

De fait, dans notre relation à l’État, si nous ne réussissons pas à faire fléchir ce dernier plus souvent, c’est que, dans ce rapport de force, nous ne créons pas assez souvent cette force qui est basée non pas sur nous, travailleurs communautaires, mais bien sur les citoyens eux-mêmes, organisés dans leurs réseaux d’entraide que nous devrions soutenir.

Ce qui fait la force du mouvement syndical, c’est l’organisation de ses membres. Ce qui fait parfois la force du mouvement coopératif, c’est quand il puise aux aspirations de ses membres.

Il en va de même dans le mouvement communautaire. Nous puiserons notre force dans celle des citoyens que nous soutiendrons dans l’expérimentation de leur pouvoir sur leur vie. Si nous gardons le cap sur le soutien au développement et à l’épanouissement des personnes, on aura là un fil conducteur qui guidera nos choix.

Quatre conditions à mettre en place pour travailler au développement social

Mais, pour ce faire, il nous faudra chacun dans nos organismes :

  1. Se donner clairement la volonté politique d’atteindre ce but de développement et d’épanouissement des personnes et de leur milieu,
  2. Passer du « client » au « citoyen »
  3. Croire aux ressources des personnes et les aborder sur cette base,
  4. Partager le pouvoir dans nos organismes avec les citoyens que nous desservons.

 

Se donner clairement la volonté politique de travailler au développement des personnes et de leur milieu

En effet, sans cette affirmation définie clairement dans les buts mêmes de l’organisme et repris concrètement dans ses objectifs annuels, il n’y aura pas de référence claire pour vérifier si les actions entreprises vont dans le sens voulu.

J’en veux pour preuve une intervention communautaire dans un quartier pauvre de Montréal où les gens n’avaient pas accès à de la nourriture fraiche, mais seulement à des dépanneurs. Les groupes en sécurité alimentaire du quartier avaient convenu ensemble d’appuyer un projet de marché public en plein air durant l’été et avaient engagé à cet effet un couple de jeunes agriculteurs qui s’installèrent devant le parvis de l’église paroissiale, en plein cœur des habitations à loyer modique. Cependant, faute de garantir le rachat en fin de journée de la nourriture non vendue auprès des habitants du quartier, les groupes communautaires laissaient aux seuls agriculteurs le risque de perte. Pourtant, chacun d’entre ces groupes achetaient quotidiennement de grossistes des quantités impressionnantes de nourriture et ils auraient pu très facilement offrir cette garantie aux agriculteurs « partenaires » du projet.

Évidemment, ce qui devait arriver, arriva. Ces agriculteurs renoncèrent l’année d’après à poursuivre le projet. On fit donc appel à de nouveaux agriculteurs, mais pour leur garantir une certaine rentabilité, on déménagea le marché devant l’aréna, à quelques deux kilomètres du site initial. L’été suivant, suivant la même logique de rentabilité, on déménagea le marché public devant la bouche de métro, à quatre kilomètres de la paroisse démunie. Résultat, la population pour laquelle on avait prévu le projet n’était plus desservie et consommait toujours les aliments peu frais des dépanneurs. On avait perdu de vue le but initial pour poursuivre un objectif à court terme : mettre sur pied un marché public.

Cela nous prouve que l’évaluation des interventions communautaires ne doit plus être perçue comme une menace gouvernementale à la survie des groupes, mais, au contraire, comme une vérification volontaire que les groupes se donnent pour identifier le sens de leurs actions, sens pris ici dans sa signification de direction et de signification. Sans l’affirmation du but poursuivi, sans l’évaluation à cette aune du travail accompli, nous sommes condamnés à l’activisme sans fin face à la pauvreté et au découragement, en fin de compte.

Passer du client au citoyen

La terminologie que nous avons empruntée aux services privés et publics n’est pas un hasard. Elle dénote une façon de voir et de faire. Elle révèle la façon que nous avons de regarder les usagers de nos services. Parler de client, c’est déposséder le citoyen qui nous paye par ses taxes de son pouvoir sur notre travail. C’est aussi le réduire à un simple rôle de consommateurs de services. Parler de citoyen, par contre, c’est reconnaître à la personne qui vient nous rencontrer son rôle actif dans la société et dans notre organisme. Parler de citoyen, c’est déjà l’inviter à prendre sa place dans cette société qui est la sienne.

Croire aux ressources des personnes et les aborder à partir de leur potentiel plutôt qu’à partir de leurs seuls problèmes

L’approche par problème est largement répandue depuis fort longtemps en médecine. Les professionnels de la santé abordent leurs patients à partir des symptômes qu’ils présentent et les traitent sur la base de ces problèmes. En service sociaux, l’approche de plusieurs travailleurs de l’État est restée sensiblement la même. Les spécialistes abordent leurs « clients » sur la base des problèmes qui les affectent et leur prodiguent des soins appropriés. Le résultat a été documenté par plusieurs recherches scientifiques : les patients se perçoivent alors comme porteur d’un problème, quand ce n’est pas comme un problème eux-mêmes.

Laissez-moi vous raconter une rencontre qui témoigne de cette question. Un jour que je proposais à un jeune homme d’assumer une tâche dans le groupe communautaire où il était membre, celui-ci me répondit : « Pourquoi crois-tu en moi ? » Mais parce que je vois bien ton potentiel, tu es intelligent, débrouillard, organisé, … à ta façon. » lui répondis-je. Et celui-ci de rétorquer : « Tu sais, il y a trois professionnels qui s’occupent de mon cas : un pour mes problèmes de toxicomanie, un autre pour mes problèmes de comportement et un troisième pour le fait que j’ai quitté l’école sans savoir lire. Et, aucun n’arrive à me sortir de la marde dans laquelle je vis. Pis tu crois que, moi, je peux m’en sortir tout seul ? » En fait, ce jeune avait intégré un message exactement contraire au but recherché par ces professionnels. Au lieu de le convaincre qu’il pouvait assumer sa vie, l’approche par problèmes de ces trois intervenants l’avait convaincu de son impuissance.

Par contre, l’approche du groupe communautaire en question, un groupe d’achats en fait, abordait la personne sur la base de son potentiel. On l’invitait à se joindre à d’autres pour acheter des aliments et s’organiser entre nous pour arriver à se les distribuer. Le message était clair, mais implicite : si je t’invite à travailler avec nous, c’est que je te considère capable de le faire. On ne demande pas à un enfant de conduire une auto. On sait qu’il ne peut pas le faire. L’important à retenir, c’est que l’approche initiale que nous développons auprès des personnes fragilisées par la vie est un message en soi. Ou nous les abordons sur la base de leurs problèmes, et alors on risque de les réduire à ces problèmes, ou on les aborde sur la base de leur potentiel et on leur transmet un message de confiance en eux. Justement ce dont ils ont besoin. De confiance !

Partager le pouvoir dans nos organismes avec les citoyens que nous desservons

Ce regard différent que nous avons sur les citoyens que nous desservons doit également se traduire par une autre façon d’organiser nos services. Si nous voulons vraiment que ces gens reprennent en main leur vie et redeviennent des citoyens à part entière, nous devons leur permettre d’expérimenter ce pouvoir, et ce, au sein même de nos organismes.

En fait, nous devons partager avec eux le pouvoir que nous détenons dans nos organismes : pouvoir d’information d’abord ! Si nous partageons avec nos usagers l’information privilégiée que nous détenons, nous leur permettons de comprendre les tenants et aboutissants de notre travail collectif et d’influer sur lui en connaissance de cause. À la limite, si nous voulons réellement que notre organisation en soit une vraiment citoyenne, nous devons nous donner les structures organisationnelles pour permettre à nos usagers de prendre du pouvoir sur l’organisme lui-même. On ne parle plus alors d’usagers, mais de membres qui ont droit de vote aux assemblées et qui peuvent se présenter au conseil d’administration. Enfin, pour parfaire le tout, il serait même utile de proposer à nos membres qui le désirent des sessions de formation pour qu’ils acquièrent les compétences qui leur permettront de mieux diriger l’organisme ou tout simplement de mieux comprendre l’environnement social qui nous englobe.

Conclusion

En terminant, je ne vous dirai que ces quelques mots. Nous sommes tous confrontés par notre travail à des gens qui vivent la pauvreté, et même, pour certains d’entre nous, la pauvreté extrême. Ces citoyens partagent notre espace commun et le modifie par leur situation. La misère qu’ils vivent les marginalise et crée une pression sur toute la société. Nous sommes concernés par leur vie, car, en quelque sorte, ce sont nos voisins, nos concitoyens. Pour les aider vraiment, il faut partager le pouvoir avec eux, leur faire expérimenter ce pouvoir afin qu’ils l’utilisent pour changer leur vie et leur milieu de vie.

Le mouvement communautaire n’a pas été créé pour se substituer à l’État, mais pour soutenir le pouvoir des citoyens sur leur environnement social, économique et politique.  Généralement, les gens s’organisent assez rapidement quand ils ont un problème criant comme nous le démontre l’exemple du Mont-Orford.  Évidemment, cela peut être plus long et plus difficile avec des personnes appauvries qui ont connu plusieurs échecs et qui ont peine à croire en eux-mêmes. Notre rôle en est alors un de soutien au développement du potentiel de ces personnes et de soutien à leur éventuelle mobilisation pour améliorer notre société.

Nos gouvernements perçoivent maintenant beaucoup mieux les pressions de la société civile qui mobilisent vraiment les citoyens et citoyennes de celles qui tablent uniquement sur les structures communautaires. Si nous voulons réellement rééquilibrer en notre faveur le rapport de force avec l’État, nous devons retrouver nos racines populaires, nous devons nous inscrire dans la trame profonde des aspirations des gens. Dans les années 70, un slogan disait : « Si on ne s’organise pas, on va se faire organiser ». Cela demeure vrai !

Travaillons donc à nous organiser. Mais faisons-le avec les citoyens de notre milieu et non pour eux.

Je vous remercie de votre attention et nous souhaite de bons échanges durant ces journées de réflexion.

27 septembre 2006

Retrouvez le PDF de la conférence ici